
Vertèbre normale

Vertèbre arthrosique
|
L'essentiel:
L'arthrose de la colonne est différente de
l'arthrose des membres.
On en parle à un âge jeune sur les radios.
Mais il n'y a pas de lien entre ce que l'on voit sur les radios et les
douleurs ressenties.
Il ne faut donc pas attacher trop d'importance à votre compte-rendu
de radio ou de scanner.
Les douleurs de colonne liées à l'arthrose peuvent s'améliorer
avec l'âge.
C'est souvent l'affaiblissement de la musculature qui rend l'arthrose
lombaire douloureuse.
La complication la plus pénible de l'arthrose n'est pas la douleur
dans le dos mais la sciatique et la cruralgie.
Rarement et seulement à un âge avancé la moelle épinière
peut être coincée par l'arthrose et donner une sensation
de jambes coupées à la marche.
En détail:
Nous conseillons d'avoir lu les chapitres sur la
lombalgie pour une meilleure compréhension.
L'arthrose de la colonne vertébrale n'a pas les mêmes conséquences
que celle des articulations des membres. Une arthrose de la hanche par
exemple, fait souffrir parce que le cartilage, qui est l'amortisseur de
l'articulation, voit son épaisseur diminuer. Les os de part et
d'autre encaissent davantage de contraintes et présentent des microfissures
qui rendent l'appui très douloureux. Les déformations des
rebords de ces os, appelés ostéophytes, ont peu de conséquences
à la hanche. Tout au plus entraînent-ils une certaine raideur
dans les mouvements extrêmes, surtout en fait parce que le propriétaire
de la hanche ne s'en sert plus. Mais une hanche ne peut pas s'enraidir
complètement, la marche lui imposant un minimum de dérouillage.
La persistance des frottements sur un cartilage détérioré
entraîne généralement, avec des hauts et des bas,
une aggravation des lésions. La gêne est grossièrement
proportionnelle au degré des dégâts radiologiques.
Rien de tel pour l'arthrose vertébrale. Une colonne très
touchée par l'arthrose (d'après les radios) peut être
complètement indolore. Les manifestations radiologiques de l'arthrose
apparaissent tôt dans la vie (dès 20-25 ans pour certains)
et deviennent très banales à partir de la quarantaine. Ils
ne faut donc lui attribuer trop vite la responsabilité des douleurs
que vous ressentez. C'est un raccourci fréquemment utilisé
par les médecins. Le radiologue indique la présence de l'arthrose
dans son compte-rendu. Vous avez commencé à mijoter sur
cette désagrégation précoce de votre squelette. Le
médecin traitant confirme ce diagnostic et vous distribue vos anti-inflammatoires
et vos anti-arthrosiques, clôturant la partie invulnérable
de votre vie!
Ce n'est pas si simple. Dans la grande majorité des cas avant 45
ans, ce sont une souffrance discale (anti-inflammatoires efficaces)
ou une souffrance articulaire postérieure (étirements
actifs efficaces) qui sont responsables de vos douleurs. La détérioration
du disque entre 2 vertèbres n'est pas superposable à l'usure
du cartilage d'une hanche. Le noyau discal est un amortisseur très
sollicité au niveau des derniers disques lombaires et peut s'abîmer
prématurément, bien avant l'âge de l'arthrose. L'évolution
naturelle se fait vers une perte de souplesse du disque voire une immobilisation
de l'articulation entre les 2 vertèbres. Cette évolution
est possible parce que les mouvements de la colonne se répartissent
entre de nombreux disques et que le blocage de l'un est possible sans
que son propriétaire n'en ressente de gêne, contrairement
à la hanche. C'est l'une des explications de l'absence de liaison
entre dégâts radiologiques et douleurs ressenties sur la
colonne: une colonne très abîmée mais peu mobile peut
faire moins souffrir qu'une colonne en apparence conservée mais
travaillant excessivement à certains endroits.
Corollaire: une colonne peut faire moins souffrir en vieillissant. En
tout cas elle fait presque toujours souffrir différemment. Nombreux
sont les exemples de personnes ayant eu mal au dos pendant des années,
et presque d'un seul coup, plus rien! Ce type de rémission est
bien rare sur une hanche.
Quand l'arthrose vertébrale pose des problèmes, après
45 ans et surtout après 55, ce n'est plus tellement par l'usure
des disques, devenus peu mobiles. La douleur lombaire proprement dite
touche surtout ceux dont la musculature est insuffisante pour protéger
ce dos abîmé. Si l'on n'a plus d'abdos, la moindre torsion
ou coup de rein au lever du lit ou d'un siège vient forcer directement
sur ces vertèbres enraidies. Les douleurs sont celles d'une instabilité,
identiques à celles des pseudarthroses
(fractures qui n'ont pas consolidé et qui deviennent des "articulations"
anormales).
Mais la principale complication de l'arthrose vertébrale est l'irritation
des grosses racines nerveuses qui sont à son voisinage immédiat.
Les déformations des rebords osseux que nous appelions ostéophytes
à la hanche sont ici plus connues sous le nom de "becs de
perroquet". Situés dans les orifices des vertèbres
par où sortent les nerfs, ils ne sont pas envahissants ou compressifs
comme peut l'être une hernie discale, mais ils sont facilement irritants
pour ces nerfs dans certaines postures. Le nerf réagit en s'enflammant,
ce qui augmente son calibre et le rend encore plus facilement irrité.
Ce cercle vicieux peut durer des mois. Son origine est essentiellement
mécanique et très peu sensible aux anti-inflammatoires habituels.
Ce sujet est traité plus en détail à sciatique
et cruralgie, qui sont les 2 nerfs
essentiellement concernés.
Les médicaments anti-arthrosiques
de fond n'ont à notre avis aucun intérêt dans
l'arthrose vertébrale, car ils sont à visée cartilagineuse
(avec un effet très modeste). Or nous venons de voir que ce sont
les déformations vertébrales qui sont essentiellement responsables
des problèmes, et celles-là aucun médicament n'est
capable de les faire disparaître.
La vertèbre forme un anneau à l'arrière. Le canal
rachidien est formé par l'empilement de ces anneaux. Il contient
la moelle épinière, agglomérat des nerfs qui descendent
du cerveau. C'est la moelle épinière qui "émet"
ces racines nerveuses à droite et à gauche entre chaque
articulation vertèbrale. Quand les déformations de l'arthrose
sont très épaisses, le canal rachidien lui-même peut
être rétréci. La moelle épinière se
retrouve à l'étroit. Cela ne donne pas une douleur dans
le dos mais un dysfonctionnement des derniers nerfs qui forment la moelle
au niveau lombaire. Vous avez l'impression d'avoir les jambes coupées
au bout d'un certain temps de marche. Ce n'est pas la douleur qui vous
arrête mais un manque de force et la sensation de ne plus sentir
vos jambes. Parfois des troubles des fonctions naturelles (pertes d'urine,
de matières, impuissance) peuvent survenir. L'apparition de ces
symtômes est très très lente, se faisant sur plusieurs
années, et sont l'apanage du très grand âge, sauf
s'il existe un glissement entre 2 vertèbres (spondylolisthésis)
qui peut favoriser plus précocément l'irritation de la moelle
épinière. Ne pensez donc pas que vous risquez cette complication
si vous avez 50 ans. Le terme médical est "claudication
médullaire intermittente", en clair un trouble de la marche
apparaissant de façon intermittente en fonction de la distance
parcourue. Il est important de reconnaître cette complication, mais
sachez qu'elle n'est pas automatiquement traitée pour autant, car
son traitement est exclusivement chirurgical: ouverture du canal rachidien.
La décision est prise en fonction du handicap ressenti plutôt
que sur le résultat des examens complémentaires.
Région > Rachis > Douleurs lombaires >
|