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Les
bases
Le tendon est l'ancrage du muscle sur l'os. Plusieurs parties: jonction
muscle/tendon, corps du tendon, jonction tendon/os (enthèse), gaine
de glissement pour les tendons les plus longs (main et pied...). La gaine
est une membrane analogue à celle qui entoure les articulations
(membrane synoviale). Comme pour l'articulation, elle sécrète
de faibles quantités de synovie qui facilite le glissement du tendon.
Sous le terme de tendinopathie sont regroupés, selon la partie
concernée:
*La déchirure de la zone charnue du tendon ressemble
à une déchirure musculaire mais est d'évolution plus
prolongée en raison de la faible vascularisation et de la réparation
plus lente du tendon.
*Le terme de tendinite concerne habituellement les lésions
du corps du tendon.
*L'enthésopathie ou
enthésite est la souffrance de la jonction tendon/os. Son évolution
ressemble aux fissurations osseuses car le délai de consolidation
de cette zone est le même: 4 à 6 semaines en l'absence de
toute traction sur le tendon, indéterminé dans le cas contraire.
*La ténosynovite est
l'inflammation de la gaine du tendon:
-Il peut s'agir d'une atteinte primitive de la gaine (ténosynovite
rhumatismale), analogue au pannus
synovial des polyarthrites. Le tendon est agressé par ce tissu.
Il se fragilise et peut finir par se rompre.
-Il peut s'agir d'une atteinte primitive du tendon (rupture de fibres
par tractions excessives ou choc direct). Un cal se forme, épaississant
le tendon. Le glissement de ce nodule peut irriter la gaine et provoquer
la ténosynovite.
Un tendon contient 2/3 d'eau, 3/4 du poids sec sont des fibres collagène
de type 1, et le reste: fibres d'élastine, protéoglycanes,
fibroblastes. Le tendon n'est pas capable de se contracter mais a une
certaine élasticité: c'est un ressort rigide qui peut s'allonger
jusqu'à 5% de sa longueur sans dommage. Rupture partielle au-delà,
rupture complète à 8% d'allongement.
L'entraînement physique développe l'épaisseur du tendon
jusqu'à la fin de la croissance. Après, l'exercice ne fait
qu'augmenter la taille du muscle, pas celle du tendon. Ainsi, il vaut
mieux ne pas démarrer tardivement une musculation intensive.
Mécanismes des tendinopathies
*Par tractions excessives:
-Soit surmenage évident du tendon: sportif ayant majoré
la durée ou l'intensité de son entraînement, reprise
trop rapide de l'entraînement après une période d'inactivité
du tendon. C'est le mécanisme de la tendinite de la rotule, des
adducteurs...
-Soit geste répétitif, pas forcément épuisant,
mais dont on n'a pas l'habitude ou vraiment trop répété
(maladie professionnelle). Par exemple, vous jouez du tournevis pour monter
un meuble en kit, vous taillez une haie toute une matinée. C'est
le mécanisme de l'épicondylite au coude, qui est une enthésopathie.
*Par frottements répétés:
Balayage ou frottement trop fréquent peut finir par irriter le
tendon ou sa gaine. C'est le mécanisme de la tendinite de la bandelette
ilio-tibiale chez le coureur (frottement sur le condyle externe) mais
aussi de la beaucoup plus fréquente tendinite de l'épaule.
*Par contusion directe:
Cause plus rare. Comme pour les déchirures par traction, la cicatrisation
du tendon est beaucoup plus longue que celle du muscle.
Tendinite et repos
La cicatrisation du tendon ne demande pas un repos strict, seulement une
grande prudence. Etant donné les délais de consolidation,
le repos complet entraînerait une fonte musculaire et d'autres troubles,
dont le moindre n'est pas la déprime! Il faut éviter de
redéchirer la cicatrice, qui reste fragile longtemps. Les règles:
-reprendre une activité physique différente de celle qui
a abîmé ce tendon (sauf en cas de choc direct)
-reprendre progressivement et ne jamais aller jusqu'à une douleur
persistante après l'effort
-pratiquer ce que l'on peut bien contrôler (sport solitaire)
-esquiver soigneusement sa douleur en repérant bien les gestes
litigieux lors d'un échauffement lent
-s'aider d'appareillages qui soulageront les tractions sur le tendon (talonnette
pour la tendinite d'Achille) ou amélioreront les sensations de
posture articulaire (genouillère). Mais ne tombez dans la surenchère
des vendeurs d'appareils plus ou moins placebos. C'est toujours un traitement
d'appoint et non un moyen de raccourcir la période d'économie
du tendon. Il faudrait pour cela un traitement activant la réparation
du tendon, qui n'existe pas actuellement.
Tendinite et anti-inflammatoires non
stéroïdiens (AINS)
Utilisée depuis longtemps dans la plupart des douleurs de l'appareil
locomoteur, la prise d'AINS repose sur un postulat simpliste: j'ai moins
mal donc ça me fait du bien. Leur bénéfice sur le
fond n'est pas démontré, voire l'absence d'effet nocif sur
le fond n'est pas démontré. Est-il vraiment sans inconvénient
de bloquer la réaction inflammatoire, processus réparateur
des tissus? Dans une situation au moins -les fissures osseuses- il est
démontré que tous les AINS retardent la consolidation de
l'os.
Il semble raisonnable de les utiliser dans une inflammation tendineuse
aiguë (mais les applications de froid et le paracétamol ne
font-ils pas aussi bien?), mais pas dans une inflammation chronique: on
a l'impression que cette inflammation/réparation n'est pas assez
efficace, pourquoi la brider avec un AINS?
Le meilleur créneau des AINS est l'inflammation rhumatismale, où
le tissu inflammatoire devient l'agresseur et non plus le réparateur.
Là sont justifiées des prescriptions au long cours de ces
produits.
Tendinite et mésothérapie
La mésothérapie agit par l'effet local des AINS, vasodilatateurs
(activent la circulation locale) et anesthésiques injectés.
Mon point de vue iconoclaste est qu'elle a comme principal intérêt
l'observance du repos par le sportif, qui vient régulièrement
faire ses séances chez le médecin et n'ose reprendre son
entraînement avant la fin du traitement...
Tendinite et infiltrations
La cortisone n'est pas meilleure qu'un AINS sur un tendon malade. Pas
pire non plus, tant qu'on ne répète pas les injections.
La réputation des infiltrations favorisant les ruptures tendineuses
n'est pas démontrée, et sans doute fausse: l'infiltration
étant proposée aux personnes les plus handicapées,
il est logique que ces tendons très détériorés
soient les plus nombreux à se rompre. Rappelons que les ruptures
sont très banales en dehors de toute infiltration, en particulier
à l'épaule. Seule une faute technique grossière comme
l'injection intra-tendineuse (pas facile à faire...) peut certainement
favoriser une rupture.
La cortisone a comme l'AINS un rôle bloqueur sur l'inflammation.
L'infiltration n'a pas d'intérêt sur une tendinite isolée.
Elle est intéressante dans une bursite ou une ténosynovite.
La gaine du tendon ou l'espace de glissement adjacent au tendon peut être
toujours empli de liquide inflammatoire alors que le tendon est réparé.
L'entretien de cette inflammation se fait par les mouvements normaux,
le surmenage ou le traumatisme initial ayant disparu. C'est la bonne indication
de la piqûre. Ce sera vérifié par la disparition complète
et définitive des douleurs en 1 à 2 semaines (si le produit
est arrivé au bon endroit...). On n'a donc pas besoin de répéter
plus d'une ou deux fois l'injection. La récidive ou la persistance
de douleurs oriente vers la rééducation, les conseils techniques,
voire dans les cas difficiles vers un bilan pré-chirurgical.
Tendinite et rééducation
Un kinésithérapeute peut se comporter en agent d'entretien
ou en éducateur.
L'agent d'entretien, c'est quand vous avez l'impression de lui avoir confié
votre carcasse comme on conduit sa bagnole au garage. On vous a malaxé,
étiré, chauffé, électrisé, refroidi
(!) et on vous a rendu un corps détendu et indolore, mais sans
avoir amélioré son mode d'emploi.
L'éducateur est beaucoup plus casse-pieds: il vous abreuve de conseils,
s'immisce dans vos habitudes personnelles, veut tout chambouler, et par-dessus
tout propose des exercices fatigants voire douloureux.
L'agent d'entretien est utile pour diminuer le recours aux calmants en
période très difficile. Il est populaire, parce que vous
partez de chez lui avec le sourire. Mais ce n'est pas lui qui va vous
tirer définitivement d'affaire. Il doit s'effacer petit à
petit en faveur de l'éducateur.
Cette évolution demande une motivation du kinésithérapeute,
soutenue par la vôtre. C'est en effet une activité moins
rémunératrice. On peut traiter simultanément plusieurs
personnes en physiothérapie, on n'en rééduque qu'une
à la fois. Les résultats sont plus aléatoires. Le
kiné et vous-même pouvez vous décourager rapidement
si vous semblez trop étranger à ses demandes ou si la douleur
vous fait vite reculer. Il est facile de se limiter au moins risqué
et au moins fatigant, mais ce sera sans doute décevant au bout
du compte.
L'éducateur est d'autant moins nécessaire que vous pigez
vite. Vous pouvez repartir dès la première séance
avec votre programme d'exercices, et venir de temps en temps montrer comment
vous faites à un oeil critique. Tout dépend de votre
proprioceptivité: c'est l'attention que vous portez aux signaux
que vous adresse votre propre corps et l'imagination que vous utilisez
pour remédier à ces alarmes.
Un exemple de rééducation spécifique: la méthode Stanish dans les tendinites du genou
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