Région > Rachis > Sciatique Cruralgie Douleurs du membre inférieurMise
à jour: 7/05
Cette page est un bon débrouillage
de la sciatique. Mais le sujet est complexe et les ramifications nombreuses
(lombalgie associée, travail, sport). Vous n'avez pas encore
trouvé la
solution à vos douleurs? Pour les adhérents: Diagnostiquez
vous-même l'origine de vos douleurs lombaires, de votre sciatique
ou cruralgie, en déterminant dans laquelle des 15 catégories
vous vous situez, avec pour chacune, l'explication de la lésion,
son histoire, les conséquences ressenties, le traitement adapté.
Quelle est l'origine
d'une douleur du mollet?
Vous n'avez pas une lésion évidente au mollet, genre bouton
ou plaie infectée. Vous n'avez pas laissé traîner
cette jambe sur la route d'un autobus ou essayé la voie aérienne
pour descendre du 2ème étage. Vous ne venez pas de déchirer
ce mollet en démarrant un peu sec. En fait il vous fait mal et
vous ne savez pas pourquoi.
Regardez votre jambe: est-elle enflée ou non? 1) Oui, elle est enflée (vraiment enflée:
attention quand on a une sciatique, les sensations sont perturbées,
vous pouvez avoir une impression de gonflement alors qu'un tiers ne verra
rien).
-On est souvent dans le cadre des problèmes circulatoires. Mais
il est peu probable qu'il s'agisse seulement d'une "mauvaise circulation".
Ces difficultés de retour veineux qui provoquent
pieds et jambes gonflés ne surviennent pas du jour au lendemain.
Elles entraînent une lourdeur plutôt qu'une douleur, touchent
généralement les 2 jambes de façon identique, s'améliorent
dès que l'on met les pattes en l'air.
-Le diagnostic à ne pas rater, à tout âge, c'est la
phlébite. Les conséquences peuvent être
graves. Toute la jambe est gonflée, mais c'est au mollet que se
situe le maximum des douleurs. On peut sentir une corde dure et très
sensible: c'est la veine bouchée. Ne la tripotez pas plus. L'examen
de choix est le Doppler des veines.
-L'autre cause grave, c'est l'extension à la jambe d'une infection
du pied. Faut-il être particulièrement négligent avec
ses pieds pour que cela puisse arriver? Oui, sauf dans le cas où
la sensibilité du pied est altérée: les diabétiques
et les personnes atteintes de maladies neurologiques doivent être
très attentifs à leurs petons.
-Si vous avez atteint l'âge de l'arthrose du genou (plus de 45 ans)
et que vous aviez depuis quelque temps une gêne à l'arrière
du genou, vous avez pu rompre un kyste poplité.
C'est une sorte de hernie de l'articulation du genou à l'arrière,
qui peut se remplir de liquide (la synovie fabriquée en excès
lors de crises d'arthrose). Sa rupture évacue le liquide entre
les muscles du mollet. C'est gênant mais assez bénin: des
massages réguliers résorbent le gonflement en 2 à
3 semaines. Le diagnostic est fait également au Doppler.
2) Non, la jambe n'est pas gonflée.
-S'il s'agit d'un problème circulatoire, c'est une artérite:
insuffisance de l'alimentation en sang artériel, oxygéné,
des tissus. Le déclenchement est lié à l'effort:
survenue régulière au bout d'un certain temps de marche.
Parfois c'est le soir après s'être allongé, ce qui
témoigne d'une artérite plus sévère. Vous
avez un âge mûr et un terrain particulier: tabagisme, hypertension,
diabète, antécédents familiaux, excès de cholestérol.
Votre pied est froid presqu'en permanence. Un médecin y trouvera
des pouls absents ou faibles.
-La cause la plus fréquente et la plus pénible de douleur
au mollet est la sciatique. La forme la plus connue de
sciatique prend tout le membre inférieur, mais elle peut ne concerner
qu'une partie de ce trajet. Souvent vous vous apercevrez qu'elle s'étend
au-delà du mollet, mais la douleur principale efface le reste.
La sciatique est souvent permanente, insupportable, mal soulagée
par les calmants usuels. L'intensité contraste avec l'aspect normal
de la jambe. Celui qui en souffre n'est pourtant pas avare d'adjectifs
pour la décrire. Il ne comprend pas pourquoi sa jambe n'a pas triplé
de volume. Même quand on lui a expliqué l'origine vertébrale
de la sciatique, il a du mal à admettre que cette jambe n'a rien!
La cause la plus fréquente n'est pas la plus prioritaire: un retard
de diagnostic sur une sciatique n'est pas vital. Ce peut l'être
pour une phlébite. Réclamer systématiquement un Doppler
est excessif: différencier les 2 causes est habituellement facile.
Mais l'examen sera réalisé au moindre doute.
-Les causes de sciatique ne sont pas toutes vertébrales: beaucoup
plus rarement il peut s'agir de maladies des nerfs eux-mêmes, ou
d'affections aux origines mal connues ("syndrome des jambes sans
repos").
-Il y a d'autres causes osseuses que les traumatismes. Il ne faut pas
être obnubilé par la sciatique et faire une radio de la jambe
pour toute douleur peu typique.
-Les sportifs s'entraînant intensivement peuvent souffrir du syndrome
des loges, gêne à la circulation sanguine provoquée
par le gonflement des muscles pendant l'effort, muscles qui sont contenus
au mollet par des membranes peu extensibles.
Que retenir?
Votre douleur au mollet a le plus de chances d'être une sciatique,
mais c'est la phlébite qui ne doit pas être ratée.
Voyez votre généraliste rapidement.
Description
générale de la sciatique
La sciatique est une douleur qui touche tout ou partie du membre inférieur.
Dans les situations les plus typiques, c'est le métamère
entier qui est douloureux: on a l'impression de sentir le trajet du nerf
jusqu'à l'extrémité des orteils. Il s'agit en fait
de l'ensemble du territoire de peau dont la sensibilité est assurée
par le sciatique. Cette douleur globale correspond à une compression
sévère du nerf: toutes les fibres nerveuses qui le constituent
sont touchées. Attention, cela n'indique pas forcément que
la situation est grave et qu'il faut intervenir rapidement (chirurgicalement).
Tout dépend de l'origine de la compression, de sa durée,
et de l'efficacité d'autres traitements.
Dans les cas moins typiques, la douleur peut se cantonner à une
partie du territoire sciatique: c'est encore assez facile de la rapporter
à la colonne vertébrale quand elle irradie à la fesse
ou à la cuisse, mais elle peut être un véritable piège
diagnostique pour le patient comme pour le médecin quand elle est
"suspendue" sur un bout de mollet (on évoque d'abord
une phlébite), un talon ou le dessus d'un pied.
Il faut imaginer le nerf sciatique comme une grosse corde faite de brins
de ficelle amalgamés. Chaque brin relie la moelle épinière
aux terminaisons nerveuses d'une petite zone de peau dans le membre inférieur.
Ce sont ces terminaisons que l'on sent quand le brin est agressé.
Quand seul un "côté" du nerf sciatique est irrité,
dans les formes moins sévères, la douleur "projetée"
au membre inférieur peut n'avoir aucun rapport évident avec
la colonne.
C'est l'importance de toujours bien préciser au médecin
les caractéristiques de sa douleur (oui, c'est vrai, il faut arriver
à se faire écouter!). Elle est très évocatrice
d'une sciatique si elle n'est pas toujours exactement au même endroit
(l'irritation sur le nerf peut se déplacer) et si elle est d'une
intensité anormale: vous avez envie de vous taper la tête
contre les murs et pourtant votre jambe n'est pas passée sous un
autobus!
Causes
de la sciatique: la hernie discale
Parmi les causes de la sciatique, parlons en premier de la plus connue,
la hernie discale.
C'est effectivement la cause la plus fréquente, mais n'en tirez
pas de conclusions hâtives. D'abord parce que traîne à
tort dans les conversations l'équation: hernie discale = chirurgie.
Ensuite parce que c'est bien la cause habituelle avant 50 ans, mais c'est
beaucoup plus rare après.
Revenons au mécanisme de la hernie discale. Commencez par vous
familiarisez avec l'anatomie de l'articulation entre 2 vertèbres:
(schéma)
Le disque intervertébral est un fibrocartilage. Il a 2 parties;
un centre (nucleus) gélatineux et un anneau extérieur (annulus)
fait de fibres circulaires beaucoup plus fermes mais qui gardent une certaine
élasticité: la consistance du disque si l'on appuie dessus
est similaire à celle des "blackboules" des enfants,
ces petites balles qui rebondissent un nombre interminable de fois. Le
disque est un système amortisseur très bien conçu:
quelles que soient les contraintes qu'il reçoit (inflexion à
droite, à gauche, de la colonne), les pressions s'égalisent
à l'intérieur grâce au déplacement du nucleus
mou, contenu par l'annulus plus rigide. Imaginez un ballon dégonflé
et aplati; si vous vous asseyez sur son bord, l'air chasse de l'autre
côté et il a moins de chances d'éclater.
Malheureusement un disque vieillit plus ou moins bien: des fibres de l'annulus
finissent par se rompre sous la pression répétée
du nucleus. Petit à petit peut se forme une fissure puis un chenal
dans cet anneau fibreux. La perforation complète peut se produire
brutalement lors d'un effort, le nucleus jaillit brutalement hors du disque:
c'est la hernie discale.
L'effort déclenchant n'a pas besoin d'être violent si le
disque est déjà fragilisé: toutes les hernies ne
sont pas déclenchées parce que l'on a tenté de soulever
son piano! La position et la répétition sont également
importants: des contraintes en rotation et en inflexion sont très
agressives pour le disque, surtout si l'on est peu attentif: la musculature
relachée ne protège plus la colonne. Et bien sûr,
un geste peu contraignant mais répété 200 fois...
pourra achever votre anneau discal.
La hernie discale n'est pas toujours brutale. Elle peut se faire progressivement
à travers une petite perforation. C'est très important.
Cela explique que l'on puisse avoir une hernie sans en souffrir. Il faut
savoir que la pratique systématique de scanners dans la population
générale a montré une fréquence non négligeable
de hernies (15 à 20%, sans doute plus si l'on examinait toute la
colonne), qui n'ont jamais fait parler d'elles. Cette notion doit mettre
fin à l'idée: hernie = forcément origine de ma douleur.
Elle peut être là depuis 20 ans alors que votre sciatique
ne date que d'une semaine. C'est là où l'intervention médicale
est essentielle pour mettre en corrélation la hernie et les symptômes
que vous ressentez.
Bien
que la hernie discale n'aie pas très bonne réputation, c'est
la cause la plus "sympathique" de sciatique avant 50 ans. Au
pire, si l'amélioration est trop lente, la chirurgie est très
efficace dans la grande majorité des cas. Il existe d'autres causes
"mécaniques" vertébrales: canal étroit
congénital, décalage entre 2 vertèbres, dont le pronostic
est voisin de la hernie discale. Il existe des causes plus dangereuses:
tumeurs, bénignes ou non, infection. Ne paniquez pas: c'est très
exceptionnel. Un bon médecin doit s'en douter en vous interrogeant
et vous examinant. Doit-il vous en avertir? Pas forcément une bonne
idée si vous êtes d'une nature anxieuse: il ne s'agit après
tout qu'une d'une hypothèse, rarement confirmée (voir la
vérité au malade). Les examens complémentaires
confirmeront ou redresseront le diagnostic si le traitement habituel ne
donne aucun résultat.
Mais en dehors des situations atypiques où le médecin va
évoquer d'emblée autre chose qu'une hernie discale, ces
examens n'ont pas d'intérêt. Si encore le fait de voir la
situation et la taille de la hernie pouvait prédire le délai
de guérison: ce n'est pas le cas. Des hernies pourtant très
impressionnantes guérissent très bien parce qu'elles sont
très inflammatoires et que le traitement médicamenteux est
très efficace. Et vice versa de petites hernies ayant déclenché
insidieusement une sciatique, d'abord à l'effort puis de plus en
plus permanente, ne sont toujours pas améliorées au bout
de plusieurs mois parce que les anti-inflammatoires n'ont pas de cible. Le scanner utilise des radiations ionisantes et n'est pas totalement
anodin. Les gens subissant globalement davantage d'examens radiologiques
que les générations précédentes, et malgré
que les doses de rayons X aient beaucoup diminué, aucune étude
ne permet de savoir de combien de cancers supplémentaires ils sont
responsables. L'IRM est un examen non irradiant. Il persiste plusieurs
freins à son utilisation: certains ne peuvent pas le subir (corps
étrangers métalliques, obésité), les appareils
sont peu disponibles (le sous-équipement français est en
voie d'amélioration) et c'est un examen coûteux: 400 €
(voir coût de la santé).
Ces
examens doivent donc être placés entre parenthèses
dans les sciatiques typiques. Le médecin n'en a pas besoin pour
vous prescrire les traitements simples, efficaces dans la majorité
des cas. Même une infiltration peut être pratiquée
sans scanner préalable: il existe en effet 2 disques potentiellement
responsables d'une sciatique, mais le trajet douloureux à la jambe
permet le plus souvent d'identifier le responsable. De plus, l'injection
se fait dans l'espace épidural, où le produit diffuse facilement
aux disques adjacents.
Le scanner et l'IRM doivent être considérés comme
des examens préopératoires. Ce n'est ni l'intensité
ni la durée de la sciatique, ni la présence de complications
comme une paralysie ou une anesthésie d'une portion de jambe, qui
doit les faire pratiquer, mais plutôt l'absence de progrès
avec les traitements de 1ère intention, dans l'ordre: repos, anti-inflammatoires
et antalgiques, infiltration
épidurale ou anti-inflammatoires en perfusion (intra-musculaire
peu utiles, voir anti-inflammatoires),
infiltration intra-durale qui devrait être remplacée par
l'infiltration foraminale, techniquement plus difficile mais ayant moins
d'effets indésirables.
Ainsi, une sciatique suraiguë mais améliorée de 50%
en une semaine a peu de chances de finir chez le chirurgien, tandis qu'une
personne handicapée seulement par sa sciatique à l'effort,
menant sinon une vie normale, peut en être au même point des
mois plus tard et justifier l'opération même si son handicap
reste modéré.
Pourquoi n'utilise-t-on pas plus facilement la solution chirurgicale?
Voyez à chirurgie du rachis.
La sciatique des seniors
Après 50 ans la hernie discale "molle" comme nous l'avons
décrite plus haut, devient plus rare. La "vieillerie"
est la cause principale. Détaillons: les disques ont travaillé
pendant des années et ont perdu leur souplesse; de chaque côté,
le corps osseux de la vertèbre est soumis à davantage de
contraintes; il se répare, mais de façon un peu anarchique:
son rebord devient épaissi, irrégulier, voire déformé
par des pointes osseuses (ce qu'on appelle "becs de perroquet"
sur la colonne). C'est le mécanisme général de l'arthrose
pour toutes les articulations. Sur la colonne, cet épaississement
vient rétrécir les trous par où sortent les racines
nerveuses (revoir <schéma>). L'étroitesse est volontiers
accentuée par des séquelles de hernies discales antérieures,
qui ont pu être responsables de lumbagos ou de sciatique à
un plus jeune âge. Le nerf s'irrite facilement dans ce trou trop
étroit, sous l'effet de petits mouvements répétés
d'inflexion ou de rotation du bas du dos, ou dans une posture qui vient
le coincer davantage. Irrité, le nerf s'enflamme et se tuméfie
modérément, ce qui a pour effet d'accentuer puis d'entretenir
le conflit. On arrive à la situation très typique d'une
personne d'un certain âge qui a fait des activités physiques
inhabituelles ou eu une mauvaise posture prolongée, et qui démarre
petit à petit dans les jours qui suivent une sciatique de plusieurs
mois.
Comme il n'y a pas de véritable étranglement du nerf comme
dans la hernie discale, le territoire de ces sciatiques arthrosiques est
moins typique et moins étendu: douleur isolée de la fesse,
cuisse, jambe... L'intensité n'atteint jamais les sommets de la
hernie discale: vous restez capable de sortir de votre lit. Vous n'avez
pas forcément mal au dos: l'arthrose de la vertèbre n'est
douloureuse que si elle est en crise inflammatoire. Le rétrécissement,
lui, est toujours là. Vous avez du mal à trouver une position
calmante: le nerf est coincé en permanence. Ce n'est qu'en réduisant
vos activités physiques et en verrouillant soigneusement le bas
de votre dos dans tous les gestes quotidiens que la douleur va petit à
petit s'atténuer.
La douleur n'est donc pas bonne conseillère: ce n'est que le lendemain
d'une mauvaise posture que vous allez en subir les conséquences,
et vice-versa de bonnes habitudes gestuelles ne produiront pas immédiatement
leur effet.
Les médicaments sont très peu efficaces sur ce type de sciatique.
Vous avalez des anti-inflammatoires en vain; les calmants, qui soulagent
bien en temps ordinaire vos douleurs d'arthrose, sont ici d'un soutien
très insuffisant. C'est parce qu'il n'y a pas une "cible"
importante en terme d'inflammation ou de lésion. Imaginez votre
colonne comme une vieille grotte pleine de stalactites: les médicaments
ne vont pas pas faire disparaître ces éperons osseux. L'oedème
du nerf, seule cible pour les anti-inflammatoires, est très modeste
et localisé. Il faudrait amener une grande quantité de médicament
juste au bon endroit. C'est ce que tente de faire l'infiltration,
souvent beaucoup plus spectaculaire que les comprimés mais au résultat
incertain: la technique de l'opérateur est importante, mais on
ne peut jamais avoir la certitude absolue de l'endroit où se situe
le conflit, et le geste doit rester d'une agression mesurée pour
une maladie certes bien invalidante, mais dont le pronostic reste bénin:
jamais de paralysie (attention, le fait d'être limité par
sa douleur n'est pas une paralysie), perte de sensibilité limitée
et temporaire (alors que dans la sciatique par hernie molle elle peut
être définitive par rupture des fibres nerveuses).
L'autre traitement efficace est plus contraignant: c'est le lombostat,
une sorte de cage baleinée qui sera votre "gendarme"
au quotidien, bloquant les petits mouvements du bas du dos dans les gestes
habituels. Le lombostat est facultatif pour ceux qui ont encore une bonne
ceinture musculaire abdominale: ayez quelques notions d'école
du dos, un peu d'attention et quelques séances chez un kinésithérapeute
pour lier tout cela. Par contre, pour ceux dont l'âge a sérieusement
entamé l'aisance, le lombostat devient une "canne" pour
cette colonne dégarnie de sa musculature originelle.
Il est porté pendant un à trois mois. Il est habituellement
rapidement efficace sur les douleurs vertébrales et semble n'influencer
aucunement la sciatique, voire la rend encore plus intolérable
si c'est une sciatique à la fesse: la peau hypersensible supporte
mal le contact du lombostat serré. On peut l'aménager en
l'échancrant à cet endroit (pas trop pour ne pas nuire au
maintien vertébral) ou en intercalant une surface moins irritante
contre la peau (certains supportent très bien le contact d'un papier
lisse et fin type journal). Le lombostat n'a pas d'effet anti-inflammatoire
direct; il évite juste l'entretien de l'irritation du nerf. Son
effet sur la sciatique est donc logiquement retardé de quelques
semaines, et il vaut mieux continuer à le porter 10 à 15
jours après disparition de la douleur irradiée au membre.
Le sevrage s'accompagne volontiers d'une rééducation, qui
vise à aider à la remise en route par des exercices musculaires
protégés. Les médecins ne la prescrivent pas systématiquement
car elle est délicate: trop enthousiaste elle peut redéclencher
l'irritation du sciatique, trop passive elle n'apporte pas grand-chose.
Sciatique de l'enfant et de l'adolescent
Elle est rare. Le médecin doit être très attentif
à la recherche de causes autres que la hernie discale. En pratique,
le scanner ou l'IRM sera généralement fait d'emblée,
contrairement à l'adulte. La souplesse de l'enfant est telle qu'il
peut parfois, en prenant une attitude très "tordue" (le
médecin parle de scoliose antalgique), ne pas tellement souffrir
de sa sciatique: il appuie ainsi très peu sur la hernie et la tolère
beaucoup mieux qu'un adulte.
Malgré tout on a tendance à proposer plus facilement la
solution chirurgicale chez l'enfant, qui semble se remettre mieux des
suites et dont les capacités physiques ultérieures sont
sans doute mieux restituées par ce traitement radical.
La kinésithérapie
est-elle utile dans la sciatique?
Vous entendrez de nombreuses réponses différentes et c'est
compréhensible: le kinésithérapeute utilise bien
des techniques, sa motivation est variable, il a une connaissance plus
ou moins bonne de la sciatique à traiter, il fait passer plus ou
moins bien son message à des patients parfois peu réceptifs
à cause d'une douleur mal contrôlée et d'une évolution
prolongée. Son rôle est très différent à
la phase aiguë d'une sciatique et lors de la remise en route.
Tout n'est pas utile dans la kinésithérapie. A la phase
aiguë, les techniques de <physiothérapie antalgique>
n'ont qu'un effet temporaire sur la douleur. Elles sont généralement
appliquées par les kinés à leur cabinet (le matériel
est rarement portatif) et le bénéfice pour le patient disparaît
sans doute dans le trajet. Elles peuvent avoir ponctuellement un intérêt
pour réduire une consommation abusive de calmants.
Le rôle le plus utile du kiné à ce stade est de donner
les conseils décrits sur ce site et de vous les personnaliser dans
votre environnement habituel. Il est parfois difficile de s'auto-médiquer
pour des conseils gestuels. Il vous manque un oeil extérieur entraîné
à repérer vos défauts. C'est l'<école du
dos>, toujours utile à perfectionner en période douloureuse
aiguë.
Quand la douleur permanente initiale s'est améliorée, le
rôle central du kiné devrait être le reconditionnement
à l'effort. La sciatique resurgit facilement et il faut trouver
le délicat équilibre entre une gymnastique douce qui aide
à retrouver ses automatismes, et des mouvements qui ne viennent
pas réveiller le conflit disque-racine nerveuse. La physiothérapie
et le massage ont ici un rôle encore plus marginal: ils peuvent
précéder ou clôturer une séance pour la rendre
mieux tolérée, mais doivent rester un traitement d'appoint.
Certains médecins sont déçus de la kinésithérapie
dans la sciatique et ne la prescrivent pas. Il faut dire à la décharge
des kinésithérapeutes que les prescriptions médicales
sont très succintes. Normalement le détail de la maladie
ne doit pas être indiqué sur l'ordonnance, qui est traitée
par les services administratifs de la sécurité sociale,
mais le médecin peut faire un courrier séparé. Quand
le traitement ne se déroule pas de la façon escomptée,
il est rare ou tardif que le médecin ou le kiné prenne son
téléphone pour faire le point. Enfin, les kinés ne
sont pas rémunérés correctement pour faire le travail
demandé. L'inflation des actes empêche leur revalorisation
et c'est au détriment de leur qualité (voir coût
de la santé).
En pratique, l'intervention du kinésithérapeute devrait
se faire au cas par cas, mais en fonction de la situation du patient plutôt
que des habitudes du médecin. D'une façon générale,
nous la conseillons, pour 2 raisons: 1) la prise en charge de la sciatique
devrait être un travail d'équipe; il est bon que les thérapeutes
soient plusieurs à tenir le même discours et à rassurer
celui qui endure une sciatique pendant plusieurs semaines. 2) l'évolution,
en particulier au plan des progrès physiques, doit être surveillée
régulièrement; le kiné, par sa disponibilité
et sa meilleure appréciation du retentissement sur la vie quotidienne,
est le mieux placé pour effectuer cette surveillance "rapprochée".
Le bon fonctionnement repose sur des couples médecins-kinés
qui marchent, par une confiance mutuelle dans leurs compétences.
Vous pouvez bien sûr connaître déjà un kiné
en qui vous avez confiance et le proposer à votre médecin,
mais n'hésitez pas à faire avec lui un "audit critique"
en cours de traitement ou lors de son renouvellement éventuel.
Mettez entre parenthèses l'aspect relationnel de votre rééducation
pour préciser les bénéfices réellement objectifs
que vous en retirez.
Comment la sciatique s'améliore-t-elle?
(A quoi vous attendre)
Progressivement. Attention, ce n'est pas l'intensité de la douleur
qui se réduit progressivement. La douleur est toujours aussi intense
quand elle survient, mais devient plus intermittente. Cela correspond
au nerf qui se dégage de plus en plus du conflit avec la hernie
discale. Quand il est encore coincé, la douleur reste aussi vive,
parfois même après des semaines d'amélioration progressive.
C'est très important. Beaucoup se découragent à
cause de cette intensité douloureuse qui ne décroît
pas. Une erreur fréquente est de réduire trop vite les calmants.
On ne s'habitue pas à une sciatique et le simple fait qu'elle se
prolonge suffit à la rendre de plus en plus insupportable. Il faut
garder un traitement calmant efficace le temps nécessaire. Vous
constaterez que votre état s'améliore en notant au besoin
le nombre d'heures quotidiennes où vous ressentez une très
forte douleur. Ce chiffre doit baisser d'une semaine à l'autre,
même s'il y a encore des hauts et des bas d'un jour à l'autre.
Il est vrai que la morphine est souvent mal tolérée. Cela
incite à la réduire et à l'arrêter le plus
tôt possible. Mais votre médecin peut remplacer les formes
à libération prolongée, conçues pour un traitement
continu, par des comprimés à effet immédiat (et bref)
pour passer les caps difficiles. Méfiez-vous quand même de
l'utilisation régulière de la morphine au-delà de
2 ou 3 mois: certaines personnes développent rapidement une dépendance
à ce produit. Il est toujours préférable si la situation
s'améliore de le relayer par un antalgique de niveau 2, dépourvu
d'un tel inconvénient.
Cruralgie La cruralgie (douleur du nerf crural) ne se différencie guère
de la sciatique que par son trajet. Le nerf sciatique est formé
de la réunion des 2 dernières racines nerveuses lombaires,
le nerf crural est la réunion des 2 racines au-dessus. Le trajet
de la cruralgie passe par l'extérieur de la hanche, l'aine et surtout
le devant de la cuisse jusqu'au genou, parfois jusqu'au devant du tibia.
Grossièrement la sciatique est la douleur de l'arrière du
membre inférieur, la cruralgie celle du devant. Les trajets sont
typiques quand la racine nerveuse est comprimée dans son intégralité
(grosse hernie discale), moins quand seule une partie du nerf est irritée
(arthrose), et il peut être difficile d'identifier si c'est plutôt
une sciatique ou une cruralgie.
Les causes et l'évolution de la cruralgie sont les mêmes
que pour la sciatique, nous vous renvoyons au chapitre précédent
pour les détails. Insistons plutôt sur les différences:
La cruralgie est moins fréquente que la sciatique mais peut être
tout aussi violente, obligeant à recourir à la morphine
d'emblée. Nous conseillons de ne pas chercher à endurer
cette douleur par réticence vis à vis des médicaments,
car c'est une douleur intense et permanente qui vient toujours à
bout des meilleures résistances. Il est toujours dommage de se
diriger hâtivement vers une solution chirurgicale à cause
de douleurs qui ont miné votre moral.
Quand une hernie discale est en cause, elle est située entre les
2ème et 3ème vertèbres lombaires, ou plus souvent
entre les 3ème et 4ème. Le test pour vérifier à
quel point votre nerf est coincé est le signe de Lasègue
inversé (à plat ventre, l'extension forcée en arrière
de votre jambe réveille la douleur). Ce test est moins utile que
le Lasègue pour le sciatique car la course de votre jambe étant
réduite on ne juge pas aussi bien de vos progrès vers la
guérison. Les traitements sont les mêmes que ceux de la sciatique.
Les conseils de comportement aussi: verrouillage soigneux du bas du dos
lors des changements de position, par un effort conscient de contraction
des abdominaux et des muscles du dos. N'oubliez pas que la cruralgie est
une douleur piégeante: pas au bon endroit, pas au bon moment. Le
seul exercice utile cherche à décompresser la zone de conflit:
allongé sur le dos, cherchez la position de bascule du bassin qui
vous semble la plus favorable (soit un peu cambré, soit au contraire
décambré, le dos plaqué contre le lit); tirez sur
les bras et les jambes comme si vous vouliez vous écarteler le
bas du dos; tirez ensuite en infléchissant sur un côté,
d'abord celui opposé à votre cruralgie, habituellement le
plus facile, plus de l'autre côté, tout en maintenant l'effet
d'allongement de votre colonne vertébrale. Ces conseils ne concernent
que les cruralgies brutales et très aiguës, presque toujours
liées à un effort et à une hernie discale. Dans les
cruralgies d'apparition insidieuse et d'évolution chronique (arthrose
et hernies agressant modérément le nerf), repos et précautions
extrêmes ne sont pas conseillées. La douleur bloque trop
les activités physiques normales et la fonte musculaire qui s'ensuit
aggrave les contraintes sur la colonne vertébrale. Ce cercle vicieux
est particulièrement difficile à rompre chez les personnes
âgées déjà dégradées physiquement.
Il faut intervenir rapidement avec ce qui peut paraître l'artillerie
lourde: infiltrations, lombostat, rééducation des membres
inférieurs, pour éviter une perte d'autonomie rapide et
difficile à rattraper.